Suzanne VALADON
1865 - 1938

Suzanne VALADON

PAYSAGE A SAINT-BERNARD (AIN), 1932

Huile sur toile signée et datée en bas à droite
Handsigned oil on canvas, signed and dated 1932.

Dimensions | Size : 81 x 65 cm

Provenance :
• Ancienne collection Teboul, Paris
Exposition :
• Paris, Galerie Georges-Petit, «Suzanne Valadon», 1932.
Bibliographie :
• Paul Pétridès, «L’oeuvre complet de Suzanne Valadon», Paris, 1971, n° P436

Vendu / Sold

   

Marie Clémentine dite Maria dite Suzanne Valadon
Bessines-sur-Gartempe (Haute-Vienne) 23 septembre 1865 - Montmartre (avenue Junot) le 7 avril 1938.

Née de père inconnu, le mari de sa mère Madeleine, un forgeron mécanicien, est mort au bagne, condamné pour fausse monnaie. C’en est trop pour la petite ville limougeaude, elles décident de s’expatrier à Paris ; dans l’atelier de l’impasse Guelma, sa mère ouvre une blanchisserie. Dès l’âge de onze ans, elle commence à travailler, à quinze elle est acrobate au cirque Molier, mais une chute ne lui permet pas de continuer. Toujours à quinze ans, elle pose pour le tableau de Puvis de Chavannes (à la Sorbonne) “le Bois Sacré” (1880-1889), et devient sa maîtresse ; elle dit que Puvis l’a fait poser aussi bien pour les femmes que pour les hommes. Elle pose également pour Wertheimer, de Nittis, et Henner. La belle Maria, une attrayante jeune fille, on dit alors une grisette, est peu farouche et a une liaison avec le peintre Miguel Utrillo. Sur recommandation de Puvis, Renoir la prend comme modèle pour “la Danse à la ville” et “la Danse à Bougival”, en 1883.
Valadon a à peine plus de dix-huit ans à la naissance d’Utrillo ; à la fin de l’année 1883, la famille s’installe au 7, rue Tourlaque. Le peintre Zandomeneghi qui l’a rencontrée au cirque Molier lui présente Toulouse-Lautrec lorsqu’il s’installe dans son immeuble en 1886; elle devient incontinent à la fois son modèle et sa maîtresse; il fait son portrait, elle figure dans plusieurs tableaux, dont ceux des jardins du père Forest, et “Gueule de bois”. Elle montre ses dessins à Lautrec qui lui-même les montre à Bartholomé, le sculpteur décide qu’il convient de les présenter à Degas. La liaison avec Lautrec se termine mal, une conversation surprise par lui et François Gauzi révèle une tentative de chantage au mariage.
Tabarant rapporte que, bien que n’ayant jamais posé pour Degas, le maître apprécie le talent brut de ses dessins, dont il garde toujours quelques exemplaires dans son atelier. Edgar Degas l’encourage à persévérer dans sa carrière de peintre et parle de “son trait souple et dur”. C’est dans son atelier que Valadon grave “Catherine au tub”, un vernis mou sur zinc, en 1895 ; la plaque est tirée par Delâtre qui dit-il “reste confondu par la violence des sillons” ; cette estampe est suivie d’une douzaine d’autres, toujours des nus. Vollard s’y intéresse. Ensuite elle utilise l’eau-forte puis le burin, on lui connaît en tout une trentaine de planches, dont trois lithographies entre 1925 et 1928.
En 1890, la famille s’installe au 2, rue Cortot, en face de la maison de Mimi Pinson. Déclaré de père inconnu, Maurice est reconnu par le peintre espagnol Miguel Utrillo, l’ex-amant de sa mère, le 27 janvier 1891 à la Mairie du IXe.
A partir de 1894, elle vit en ménage avec Paul Mousis, qui a des biens. Ils se marient le 5 août 1896. En 1898, ils déménagent au 12, rue Cortot ; en 1905, Paul Mousis achète un terrain à Montmagny et y fait construire un pavillon en meulière, pour Maurice Utrillo et sa grand-mère. Suzanne Valadon n’est cependant pas faite pour une vie bourgeoise ; trop indépendante, insoumise elle continue à fréquenter la bohème locale; on la voit chez Adèle rue Norvins et au Lapin Agile.
C’est en 1908 qu’André Utter, ami d’Utrillo et son cadet de trois ans, rencontre Suzanne ; elle lui est restée sentimentalement attachée jusqu’à sa mort. Degas ne semble pas avoir approuvé cette liaison, et prend ses distances. Dans l’attente du divorce, Suzanne et sa mère s’installent impasse Guelma, au 5 où se trouvent déjà Dufy, Braque et Severini. Le divorce est prononcé en 1911, elle reprend l’ancien atelier d’Emile Bernard, au 12, rue Cortot, et devient ainsi la voisine de Mousis. Il est certain que la présence d’Utter apporte un épanouissement dans la vie de Suzanne Valadon ; ils se marient en 1914, à la Mairie du XVIIIe. Après la guerre, ils habitent près de Lyon, Maurice Utrillo est resté rue Cortot. Suzanne peint des paysages presque impressionnistes, des nus, des églises et des fleurs. En 1922, Utter achète le château Saint-Bernard, dans l’Ain, grâce au produit de la vente des œuvres de Maurice. En 1925, le contrat avec Bernheim permet d’acquérir la maison du 11, avenue Junot, où Suzanne reste jusqu’à sa mort, en 1938. Depuis plus de dix ans André Utter vit séparé d’elle, au 12, rue Cortot, après avoir vendu le château. Gazi le tatar apparaît dans sa vie en 1934 et reste son fidèle compagnon jusqu’à son décès en 1938.Valadon expose à la Nationale des Beaux-Arts en 1894, puis aux Indépendants, enfin au Salon d’Automne, dont elle devient sociétaire, en 1920 ; en 1923 elle y présente “la Chambre bleue” et une “Nature morte aux gibiers”.
En 1932 Daragnès effectue un nouveau tirage des dix-huit planches de gravures qu’elle avait réalisées entre 1895 et 1910.
Depuis le 25 avril 1961, la placette, située en bas de la rue Foyatier au niveau du 2, rue Tardieu, au pied du Funiculaire, porte le nom de Suzanne Valadon.
Valadon reste l’un des personnages les plus excentriques de la Butte, bien que son comportement n’ait jamais vraiment surpris les indigènes qui en voyaient d’autres. Il est d’ailleurs assez plaisant de noter qu’aujourd’hui certains souhaitent en faire une suffragette. Les mœurs de la Butte étant ce qu’elles étaient, la vie indépendante de la “terrible Maria” ne pouvait en aucun cas choquer. Par contre il est bien certain qu’à Montmagny ou à Saint-Bernard dans l’Ain, la situation était différente. Ce qui a pu surprendre la colonie artistique locale, c’est que Suzanne non seulement se conduisait comme un homme mais peignait de même. Elle a décrit sans concession la misère des femmes et des jeunes filles de son époque en une sorte d’expressionnisme bien contrôlé. Elle a peint le nu masculin comme le nu féminin, comme personne avant elle ne l’avait fait. Suzanne a bien entendu fait nombre d’emprunts à son entourage de peintres, mais elle a essentiellement suivi une voie personnelle qui n’a pas toujours été comprise par ses contemporains. C’était un peintre pour peintres.
Suzanne possédait une spontanéité qui échappe à tout enseignement d’école, et qu’il est si difficile de comprendre et d’expliquer chez une femme sans culture artistique, mue seulement par son instinct.


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Texte issu du Dictionnaire des Peintres à Montmartre par André Roussard.

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